La Cour de Cassation a récemment fait une application stricte, mais cependant justifiée, de ce principe que chacun connaît depuis sa plus tendre enfance.
Dans cette affaire, un couple marié de particuliers a entrepris de rénover sa maison d’habitation et de faire réaliser une extension.
Pour ce faire, ils se sont attachés les services d’un architecte dans le cadre d’une mission complète de maîtrise d’œuvre ainsi que d’une entreprise du bâtiment pour la réalisation de travaux divers.
Les maîtres de l’ouvrage ont résilié le marché de travaux et convoqué (par lettre recommandée et télécopie) l’entreprise afin d’établir un état des lieux valant procès-verbal de réception.
Ledit procès-verbal a ensuite été dressé avec réserves compte tenu des désordres constatés par les maîtres de l’ouvrage, précision faite que l’entrepreneur ayant réalisé la construction litigieuse n’était ni présent ni représenté malgré sa convocation régulière.
Après avoir régularisé plusieurs déclarations de sinistre auprès de leur assureur dommage-ouvrage, les époux ont fait réaliser la démolition puis reconstruction de certains éléments de l’ouvrage, l’ensemble étant financé par l’assureur qui s’est ensuite retourné contre les locateurs d’ouvrage.
Dans leur argumentaire, l’entrepreneur et son assureur reprochent à la Cour d’appel de les avoir condamnés au remboursement des sommes avancées par l’assureur dommage-ouvrage des maîtres de l’ouvrage alors que l’entreprise n’était pas présente lors de la réception, ces derniers invoquant le caractère non-contradictoire de la réception des travaux.
Rappelons que la réception est l’acte unilatéral par lequel le maître d’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Celle-ci doit être impérativement contradictoire selon les dispositions de l’article 1792-6 du Code civil.
La Cour va décider de sanctionner le manque de diligences de l’entrepreneur :
« Mais attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que l’entreprise avait été convoquée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception datée du 27 juillet 2009 et par une télécopie du même jour, qui a été adressée au numéro de la société A… figurant sur les procès-verbaux des réunions de chantier et étant celui auquel avaient été adressées des télécopies de M. V… écrivant à l’entrepreneur pour lui notifier des erreurs d’exécution, et qui avait été reçue, la cour d’appel, qui a retenu, à bon droit, que la réception prononcée en présence du maître de l’ouvrage et du maître d’œuvre, alors que l’entrepreneur avait été valablement convoqué, était contradictoire, a légalement justifié sa décision de ce chef »
Autrement dit, sous réserve de s’en constituer la preuve, la convocation des entrepreneurs permet donc une réception contradictoire des ouvrages, opposable à l’entreprise de construction, que celle-ci ait décidé de s’y rendre ou non.
Belle illustration, s’il fallait le rappeler, que les entreprises gagnent à rester diligentes et réactives lorsque le bien-fondé de leur travail est remis en cause par leurs clients ou par des tiers.
(Civ 3ème, 7 mars 2019, n°18-12.221, Publié au bulletin)