Saisi par l’association France Nature Environnement d’un recours pour excès de pouvoir contre le décret n°2018-435 du 4 juin 2018 modifiant des catégories de projets, plans et programmes, le Conseil d’Etat, dans sa décision en date du 15 avril 2021 (n°425424) a annulé partiellement le d) de la rubrique 44 de la nomenclature annexée à l’article R.122-2 du code de l’environnement relative aux équipements sportifs, culturels ou de loisirs et aménagements associés, sur conclusions conformes du Rapporteur public,
Si cette annulation ne concerne que le d) de la rubrique 44 d), le raisonnement tenu par le Conseil d’Etat apporte des précisions importantes sur la notion de projet susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement au sens de la directive du 13 décembre 2011 qui impliquent une modification plus large de la nomenclature R. 122-2.
En effet, le Conseil d’Etat précise que :
« 7. Il résulte des termes de la directive, tels qu’interprétés par la Cour de justice de l’Union européenne, que l’instauration, par les dispositions nationales, d’un seuil en-deçà duquel une catégorie de projets est exemptée d’évaluation environnementale n’est compatible avec les objectifs de cette directive que si les projets en cause, compte tenu, d’une part, de leurs caractéristiques, en particulier leur nature et leurs dimensions, d’autre part, de leur localisation, notamment la sensibilité environnementale des zones géographiques qu’ils sont susceptibles d’affecter, et, enfin, de leurs impacts potentiels ne sont pas susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine. »
C’est précisément parce que le d) de la rubrique 44 exclut « certains projets de toute évaluation environnementale sur le seul critère de leur dimension, sans comporter de dispositions permettant de soumettre à une évaluation environnementale des projets qui, en raison d’autres caractéristiques telles que leur localisation, sont susceptibles d’avoir une incidence notable sur l’environnement ou la santé humaine. » que le Conseil d’Etat en a prononcé l’annulation – suivant en cela la jurisprudence de la CJUE (par exemple, cf. CJUE, 20 novembre 2008, Commission c/ Irlande, aff. C-66/06, §64).
Mais surtout, le Conseil d’Etat en déduit que :
« L’annulation prononcée au point précédent implique que le Premier ministre prenne des dispositions réglementaires permettant qu’un projet, lorsqu’il apparaît qu’il est susceptible d’avoir une incidence notable sur l’environnement ou la santé humaine pour d’autres caractéristiques que sa dimension, notamment sa localisation, puisse être soumis à une évaluation environnementale. Il y a lieu, pour le Conseil d’Etat, d’ordonner cette édiction dans un délai de neuf mois à compter de la notification de la présente décision ».
Il faut donc s’attendre à d’importantes modifications de la nomenclature annexée à l’article R. 122-2 du code de l’environnement mais peut-être également à de nouveaux contentieux, le raisonnement du Conseil d’Etat étant susceptible de s’appliquer à de nombreuses rubriques.
On pense notamment à la rubrique 39 relative aux travaux, constructions et opérations d’aménagement, pour laquelle les seuils prennent seulement en considération la dimension des projets (surface de plancher ou emprise au sol), sans égard pour leur localisation – si ce n’est leur localisation en zone urbaine, pour mieux exclure le caractère systématique de l’évaluation – ou encore à la rubrique 41 relative aux aires de stationnement ouvertes au public.
Une solution, réclamée d’ailleurs par l’association requérante dans son recours gracieux et évoqué par le Rapporteur public dans ses conclusions, consisterait notamment à introduire une « clause filet » pour permettre à l’autorité compétente d’exiger une évaluation environnementale pour les projets qui, bien que ne franchissant pas les seuils du cas par cas, sont néanmoins susceptible d’avoir un effet notable sur l’environnement, au regard, en particulier, de leur localisation.
CA et SLG le 22/04/2021