Conformément à l’article R. 612-5-2 du code de justice administrative, en cas de rejet d’un référé suspension « au motif qu’il n’est pas fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision », le requérant doit confirmer le maintien de sa requête à fin d’annulation dans un délai d’un mois à compter de la notification de ce rejet.
L’alinéa 2 du même article ajoute : « Dans le cas prévu au premier alinéa, la notification de l’ordonnance de rejet mentionne qu’à défaut de confirmation du maintien de sa requête dans le délai d’un mois, le requérant est réputé s’être désisté. »
Les termes de l’article R. 612-5-2 du code de justice administrative ne souffrent d’aucune ambigüité : l’obligation de maintien des conclusions à fin d’annulation n’est applicable que lorsque la requête en référé suspension est rejetée pour défaut de moyen sérieux et non pour défaut d’urgence.
C’est ce qu’a rappelé la Cour administrative d’appel de VERSAILLES dans une décision en date du 23 janvier 2020 (n°19VE01151-19VE01152).
Dans le cas d’espèce, le requérant avait contesté la caducité de son permis de construire ainsi que l’arrêté d’interruption de travaux dont il avait fait l’objet par deux référés-suspension et deux requêtes en annulation.
Alors que ses requêtes en référé-suspension avaient été rejetées pour défaut d’urgence (cf. « Dans quelles conditions peut-on obtenir la suspension d’un arrêté interruptif de travaux ? », Commentaire sous JRCE, 28 mars 2008, n°314368, BJDU, 2008, n°2, p. 133), le Tribunal administratif de VERSAILLES avait toutefois prononcé, certainement par erreur, le désistement d’office du requérant pour ne pas avoir confirmé ses requêtes au fond.
Le requérant a donc été contraint d’interjeter appel des deux ordonnances prononçant son désistement d’office et attendre 9 mois pour en obtenir l’annulation par la Cour administrative d’appel de VERSAILLES et le renvoi de ses requêtes initiales devant le Tribunal administratif.
Malheureusement, il ne s’agit pas d’un cas isolé, ce qui confirme la difficulté de certains tribunaux administratifs à appliquer l’article R. 612-5-2 du code de justice administrative (cf. DE MONTECLERC M.-C., « Le désistement involontaire, une chausse-trape pour les requérants », AJDA, 2019, p. 312 ; CAA Bordeaux, 31 octobre 2019, 19BX00354).
Or, de tels erreurs sont extrêmement préjudiciables pour les requérants et leurs tant en termes de délais qu’en termes de coût de procédure.
Pour illustration, dans le cas d’espèce, le requérant a dû attendre 9 mois pour que son désistement d’office soit annulé et son dossier renvoyé devant le tribunal administratif et ce, alors même qu’avait été prononcée une dispense d’instruction, en application de l’article R. 611-8 du code de justice administrative. Encore, il n’a pu obtenir de la Cour administrative d’appel le versement des frais irrépétibles, de sorte que le coût de l’appel est demeuré à sa charge.
Aussi, pour éviter de telles déconvenues, il apparaît plus prudent de confirmer, en toute hypothèse, le maintien de sa requête au fond en cas de rejet d’un référé suspension.
Les avocats devront redoubler de vigilance puisque la mention de la nécessité de confirmer le maintien de la requête au fond sous peine de désistement d’office, qui doit apparaître dans le courrier de notification de l’ordonnance de rejet au requérant, en application de l’alinéa 2 de l’article R. 612-5-2 du code de justice administrative, n’a pas à apparaître sur la copie du courrier adressée à l’avocat selon la jurisprudence de la Cour administrative d’appel de LYON :
« l’exigence posée au second alinéa de l’article R. 612-5-2 du code de justice administrative ne trouve à s’appliquer qu’à la notification de l’ordonnance de référé faite au requérant lui-même et non à celle de la copie qui a pu en être adressée à son conseil » (CAA LYON, 6 décembre 2019, n°19LY01744 ; CAA LYON, 3 décembre 2019, n°19LY00495).
Dans la décision susvisée, la position de la Cour administrative d’appel de VERSAILLES n’est pas aussi claire.
En effet, alors qu’était contesté l’absence de mention, dans le courrier de notification de l’ordonnance de référés envoyé via Télérecours à l’avocat du requérant, l’invitant à confirmer sa requête, la juridiction d’appel a seulement précisé :
« Au surplus, les notifications des ordonnances de rejet des demandes de suspension ne mentionnaient pas, contrairement à ce que prévoit le second aliéna […], qu’à défaut de confirmation du maintien des requêtes dans un délai d’un mois le requérant est réputé s’être désisté ».
Faut-il interpréter ce considérant comme exigeant d’apposer la mention prévue à l’alinéa 2 de l’article R. 612-5-2 du code de justice administrative non seulement dans le courrier de notification au requérant mais également dans la copie adressée à son conseil ?
Rien n’est moins sûr.
Dans ce contexte, les avocats doivent faire preuve d’une particulière vigilance en cas de rejet d’une requête en référé suspension et procéder à une confirmation systématique de leur requête au fond car, en l’état de la jurisprudence, ils ne pourront compter sur un rappel du greffe de la juridiction dans le courrier de notification qui leur est adressé via l’application Telerecours.
SLG – 28/01/2020